Biologie - Février 1992
Imaginez des doigts en plastique capables de saisir des objets ou des insectes artificiels pouvant bouger leurs pattes.
Ce sont quelques une des surprises que réservent aux scientifiques les machines dites chimiomécaniques capables de transformer de l'énergie chimique en énergie mécanique. Plusieurs laboratoires dans le monde travaillent sur ces étranges machines dont la voie avant été ouverte dès les années 50 par le biochimiste Aaron Katchalsky. Le secret de la conversion chimiomécanique ce sont des matériaux intelligents répondant à des impulsions extérieures. Par exemple des polymères capables de se contracter ou de s'allonger sous l'effet d'un changement dans l'environnement, tels que l'acidité, la température ou un simple courant électrique. Pour la première fois un laboratoire japonais a réussi à fabriquer un gel se comportant comme un muscle. Immergé dans un électrolyte ce gel se courbe, s'allonge, bouge grâce à des faibles impulsions électriques. C'est exactement le comportement des flagelles, des cils vibratils qui permettent à des bactéries, des algues ou des paramécies de se déplacer à la recherche de nourriture. L'équipe japonaise dirigée par Yoshihito Osada a même réussi à fabriquer des êtres étranges à allure de science fiction : un minuscule poisson artificiel nageant allègrement à la vitesse de 2 cm par seconde grâce à une queue en hydrogel. D'autres équipes ont mis au point d'encore plus curieuses machines chimiomécaniques comme un doigt artificiel capable de saisir des objets dans l'air ou des insectes grimpant sur des plans inclinés ou battant leurs ailes synthétiques. On comprend l'immense intérêt de ce type de recherche : on pourra par exemple fabriquer des machines moléculaires comme des vésicules programmées et des pompes microscopiques pour distribuer des médicaments ou encore des moteurs de minuscules robots pouvant se déplacer dans le corps pour l'opérer de l'intérieur !